tous mes ballons

Publié le par lilou

Gris. Il faisait tout gris ce matin-là. Grisaille et brouillard. Alors, avec papa
et maman, on est allé promener Filou au parc. Filou, c'est mon chien.
Au parc, il y avait un monsieur qui vendait des ballons de toutes les couleurs.
Comme on était quatre, papa a acheté quatre ballons ; mais c'est moi qui les
ai tous reçus. J'étais content, je marchais en regardant en l'air. Il y avait un
ballon rouge, un jaune, un bleu et un blanc ; je les tenais en mains par les
ficelles et j'avais l'impression que j'allais m'envoler.
A partir de ce moment, j'eus toujours des ballons accrochés aux mains.
Ainsi, j'oubliais le temps gris. Je vivais le nez en l'air et j'étais heureux.

Puis, un jour, Filou est mort.
Et j'ai été promener tout seul dans le parc.
J'étais perdu dans mes pensées ; je ne l'ai pas vu venir. Pendant que je
marchais, un monsieur gris est sorti de l'ombre et s'est approché de moi.
Il avait sans doute une épingle en main car, tout d'un coup, il a fait un geste
et,
PAF !
mon ballon jaune a éclaté. Le méchant bonhomme, lui, a éclaté
de rire et s'est enfui en courant.
Moi, j'ai pleuré beaucoup.
Ensuite, il s'est produit quelque chose d'étrange.
Quand j'ai relevé la tête, je n'avais plus que trois ballons, mais on aurait dit
que le blanc avait un peu jauni, on aurait dit que le ballon jaune avait déteint
sur le blanc en éclatant. Drôle… Dans mon cœur, j'ai alors senti une chaleur,
comme quand Filou me donnait une lèche ; ça m'a fait du bien.
Du temps a passé. Avec trois ballons accrochés aux mains, le nez en l'air,
j'étais content.

J'aime autant vous prévenir, tout n'est pas rigolo dans mon histoire.
Un jour, papa est parti. Pourquoi ? Je ne sais pas trop. Où ? Je ne sais pas
vraiment non plus. Je sais seulement que j'étais très triste.
Et j'ai été promener tout seul dans le parc.
J'étais perdu dans mes questions ; je ne l'ai pas vu venir. D'un geste
brusque, il a enfoncé son épingle dans mon
ballon rouge. BANG !
Puis le méchant bonhomme s'est encouru en riant.
Moi, j'ai hurlé. Ça faisait tellement mal.

Il s'est à nouveau produit quelque chose d'étrange.
Quand j'ai relevé la tête, je n'avais plus que deux ballons, mais on aurait dit
que le blanc avait un peu rougi, on aurait dit que le ballon rouge avait déteint
sur le blanc en éclatant ; et aussi sur le jaune qui s'y trouvait déjà. En sorte
que mon ballon blanc était blanc, rose, rouge, orange et jaune. Chouette !
J'ai senti alors que mon cœur se serrait, comme quand papa me serrait
dans ses bras. C'était bon, ça faisait du bien.
Du temps a passé. Avec deux ballons, un dans chaque main, le nez en
l'air, j'étais content.
Je vous ai prévenu, hein ! tout n'est pas rigolo dans mon histoire.
Maman est tombée malade. Ça arrive.
Oui, j'ai été promener tout seul dans le parc.
Non, je n'ai pas vu venir le méchant bonhomme, j'étais perdu dans ma
tristesse.
BOUM !
Cependant
l'étrange phénomène s'est encore produit.
Quand j'ai fini par relever la tête, je n'avais plus qu'un ballon, le blanc, mais
on aurait dit que, cette fois, il avait bleui. Et pas seulement bleui car, vu qu'il
y avait déjà du rose, du rouge, de l'orange et du jaune, mon ballon avait
maintenant toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Super !
Et j'ai senti que mon cœur se gonflait comme quand maman me faisait un
câlin le soir. Au-dedans de moi, il y avait un ballon prêt à s'envoler.

Du temps a passé. Je ne lâchais pas mon unique ballon, il était bien trop
beau. Quand je me promenais dans le parc, en le regardant, je me sentais
moins seul
.
Je l'ai vu venir.
Le vilain monsieur gris est sorti de la grisaille et du brouillard. Il venait vers
moi avec un affreux sourire et j'ai vu l'épingle qui brillait dans sa main.
Oh, non ! Les deux mains cramponnées à mon ballon, je suis tombé à
genoux et j'ai fermé les yeux. Mon cœur a éclaté.
Plus tard, quand j'ai ouvert les yeux, je n'ai d'abord vu qu'une ficelle ;
la ficelle qui retenait le ballon pendait là, vide, entre mes mains.

Puis, j'ai relevé la tête, il n'y avait plus là-haut que le bleu du ciel.
Le bleu du ciel ?!

Mais oui, le ciel était bleu, l'herbe était verte, une fille en rose courait
avec un chien noir et blanc. Il y avait plein de gens et plein de couleurs.

En explosant, mon ballon arc-en-ciel avait répandu toutes ses couleurs,
comme s'il avait déteint sur ce monde gris.
Depuis lors, tout l'univers est devenu joliment coloré.
Même très beau.

Et je suis heureux.

Christian Noefnet

Publié dans contes d'enfants

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
S
<br /> Je suis sidéré par la profondeur de tes histoires et la qualité du style. BRAVO!!!<br /> L'histoire du Zèbre m'a laissé perplexe, car tu n'as jamais fait dans tes textes des fautes d'orthographes, c'est pourquoi je crois avoir compris ton jeu de mot "rayures" et "raillures"par<br /> référence aux raies du banc.<br /> Je ne te reconnais pas ...Qui es-tu? Grand-père<br /> <br /> <br />
Répondre
S
<br /> mon Lilian ,<br /> la vie est pleine de surprises ,mais la plus grande c ' est de découvrir ton imagination ,<br /> je t ' aime<br /> Grand-mère<br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> Merci beaucoup. Tes commentaires stimulent encore plus mon imagination!<br /> <br /> <br />
T
<br /> Mon lilian, déjà tu m'épatais, alors là, tu m'as scotchée, je te félicite et te demande de continuer à écrire.J'ai vécu ton histoire. gros bisous à tous<br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> Merci et surtout, continue à te régaler car moi aussi je me régalle<br /> bisous<br /> <br /> <br />